La mondialisation des sociétés humaines, par la migration, les progrès des technologies des communications, les voyages, la vulgarisation universelle des arts accroissent le rapprochement entre les êtres humains. Elle entraîne des existences communautaires entre des gens nés dans les divers coins du monde, porteur des langages identitaires singuliers. Pour que chaque élève se retrouve dans la pratique de la pédagogie menée par les enseignants, l’éducation à la littératie doit intégrer ces singularités identitaires, d’autant que l’éducation se particularise par la différenciation pédagogique qui doit favoriser la prise en compte des besoins de développement singulier de chaque élève.
À cause de la mondialisation, partout en Occident, on assiste effectivement de plus en plus, à la constitution des nations multiculturelles et multilinguistiques. Le Canada est le parfait exemple d’une nation ou le multiculturel et où le phénomène du multilinguisme fait croiser dans les mêmes salles de classe des identités langagières diverses. Cette diversité de langue et de compréhension entraîne aujourd’hui, plus que par le passé, des défis sociologiques qui sont de nature à bouleverser les pratiques pédagogiques d’antan.
Par le passé la pédagogie de la langue portait pour l’essentiel sur les produits de la connaissance. Puisque la langue et même la culture étaient uniques, la pédagogie tradition qui prévalait imposait le savoir à acquérir. C’était essentiellement la pédagogie traditionnelle.
Les communautés humaines qui habitaient le Canada au début du 18e et même du 20e siècle n’ont plus rien à avoir avec celles qui le façonnent en 2012. Certes l’immigration a toujours été à la base de la constitution de ce pays, lorsque des immigrants venus de France et d’Angleterre ont réussi à partager le mode de vie des premières nations et que par la suie ils furent suivis par d’autres immigrants venus d’autres pays de l’Europe à partir du premier tiers du 20e siècle.
Mais les formes d’immigration d’antan ne sont plus les mêmes que celle d’aujourd’hui. Elles sont plus diversifiées en ce qui à trait à l’origine des immigrants qui prennent asile au Canada. De fait, le Canada est sur le plan ethnolinguistique l’une des Nations les plus diversifiées du monde. De plus, le phénomène de la mondialisation qui met en contact un citoyen canadien de Trois-Rivières au Québec et un citoyen de Bandung en Indonésie juxtapose des réalités de vie qui sont impénétrables les unes les autres. Cette connexion de citoyens, se trouvant dans leur pays respectif, par le progrès des technologies de la communication est une vérité que l’on retrouve avec acuité à l’intérieur d’un même pays, dans la même salle de classe au Canada. Dans nos écoles, nos salles de classe, il est possible de répertorier plus d’une dizaine identités ethnolinguistiques. Chaque identité est porteuse d’une saveur, d’un itinéraire et d’un vécu qui façonnent une appréciation et une appréhension du monde distincte les unes des autres.
Pour permettre l’apprentissage des élèves, dans le contexte du multiculturalisme et du métissage qu’il favorise, les activités qui sont élaborées dans le cadre du développement des habiletés en littératie doivent tenir compte des distinctions identitaires ethnolinguistiques pour susciter un apprentissage régulier de tous les élèves. En quoi le multiculturalisme et le multilinguisme doivent-ils favoriser des pratiques pédagogies de littératie qui doivent prendre assise dans un vécu langagier divers?
Qu’est-ce que la littératie?
La littératie désigne la capacité d’utiliser le langage et les images, de formes riches et variées, pour lire, écrire, écouter, parler, voir, représenter et penser de façon critique. Elle permet d’échanger des renseignements, d’interagir avec les autres et de produire du sens. C’est un processus complexe qui consiste à s’appuyer sur ses connaissances langagières et imaginaires antérieures, sa culture et son vécu pour acquérir de nouvelles connaissances pour appréhender le langage, les représentations, l’imaginaire d’ici et venu d’ailleurs pour mieux comprendre ce qui nous entoure.
Selon Masny, (2001), si la littératie permet à l’individu de passer de l’acte de lire un texte à lire le monde et à se lire, elle n’est pas que la compréhension de mots et de leur transcription. Elle est surtout la traduction des significations de sens. Le sens d’une réalité n’est pas absolu. Il est relatif à ce que l’on sait préalablement. C’est par l’appréhension de ce patrimoine que l’individu s’institue cognitivement et se situe socialement par rapport à lui-même, par rapport à ceux qui partagent son univers social. L’apprentissage étant pour beaucoup fondé sur les émotions, faut-il aller puiser dans le vécu émotif de l’élève. Le vécu émotif de l’élève étant indubitablement associé à son patrimoine culturel et historique, pour l’amener à comprendre la réalité que l’on souhaite qu’il se saisisse, la pédagogie de la littératie doit en tenir compte.
Favoriser des pratiques pédagogiques de littératie diversifiée.
Dans leur rôle d’éducateurs scolaires, les enseignantes et les enseignants d’aujourd’hui doivent aller au-delà de la littératie traditionnelle d’une part pour s’assurer que l’on réponde au besoin de compréhension de l’élève par rapport à son vécu, qu’il soit en mesure d’interpréter les réalités littéraires qui lui sont présentées et pour le préparer à des rôles et des formes de citoyenneté qui n’existaient pas encore il y a seulement vingt ans. Il importe par conséquent que les enseignants et les élèves en soient bien conscients et comprennent que le champ d’application de la littératie est très vaste, elle doit permettre une réflexion sur le monde de communication à valoriser dans les salles de classe.
En cela, l’éducation de la littératie dans un contexte multiculturel initiera les élèves aux principes fondamentaux de la lecture et les sensibilisera au langage d’ici et d’ailleurs. Cet enseignement proposera un éventail de textes susceptibles d’embrasser de façon large et diversifiée l’ensemble des réalités du monde dans le but précis d’aider les élèves à devenir des communicateurs actifs, critiques, responsables et créatifs pour le XXIe siècle.
Selon la table ronde sur la littératie en Ontario, c’est en lisant des textes qui sont porteurs de sens que les élèves développeront leurs compétences en littératie. Ils seront également en mesure d’explorer continuellement de nouveaux textes et de nouvelles façons de comprendre des textes connus. Au fil de leurs expériences, ils en viendront à affûter leur capacité de créer et d’échanger des textes de tous genres. Subséquemment, ils utiliseront au mieux leurs capacités cognitives pour découvrir de nouvelles façons d’accéder aux ressources d’un monde multiculturel.
En définitive, les élèves s’identifieront aux réalités littéraires qui leur seront soumises et se sentiront valorisés et reconnaîtront indubitablement que la lecture et l’écriture sont vraiment pour eux et les concernent. En plus de voir leur identité valorisée, «ils apprendront à connaître la culture et l’identité de leurs camarades de classe et des autres membres de la collectivité, ainsi qu’à apprécier la richesse et la diversité de la société canadienne». On ne peut que convenir que si les pratiques pédagogiques en littératie prennent assise sur ces bases, les élèves apprendront à vivre dans le respect des autres et avec le dynamisme intellectuel qui s’impose dans un monde multiculturel. Ils seront disposés à utiliser leurs habiletés supérieures de la pensée et leurs habiletés en littératie critique, compétences que nous cherchons à développer chez eux.
Laura Gayo
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