Le Gabon s’illustre par une « révolution » politique non-violente à travers un concept usité dans les années 1990 : la Conférence Nationale Souveraine. Celle-ci, a été proposée par des Gabonais connus et a été approuvée par les Forces de l’Opposition Gabonaise, la Société Civile et la Diaspora Gabonaise (ou Gabonais de l’extérieur). Elle repose à notre sens sur un contenu d’arguments que nous allons exposer pour s’écarter de toute tentative de s’en servir à d’autres fins.
1) LES ARGUMENTS DE DROIT
Il faut qu’il y ait une Conférence Nationale Souveraine au Gabon pour la bonne raison que notre pays doit retrouver « l’esprit des lois », à travers un « nouvel acte démocratique » puisque depuis des décennies en général, et le 30 août 2009 en particulier, la République Gabonaise vit en dehors d’un cadre légal qui garantit le contrat social entre tous les Gabonais.
Seules des résolutions d’une Conférence Nationale Souveraine pourraient orienter notre nation vers un retour satisfaisant à « l’esprit des lois ».
2) UN VIDE JURIDIQUE A COMBLER AU GABON
Nous assistons depuis longtemps en République Gabonaise, à une accumulation de « contentieux » qui sont en train de détruire le tissu du pays, seule une Conférence Nationale Souveraine peut offrir un cadre adéquat au règlement de ces contentieux, les institutions de l’Etat Gabonais ne parvenant pas à les régler.
Il y a eu une succession de coups d’état électoraux dans notre pays dont celui du 30 août 2009 constitue un symbole édifiant ; les nouvelles autorités ont supprimé les salaires et les emplois de nombreux Gabonais dans un contexte économique pourtant dégradé dès le dernier trimestre de 2009 ; ensuite, le parti UNION NATIONALE dont nous avons été un des fondateurs a été interdit ; le Pouvoir Gabonais a, par la suite, négocié avec l’opposant historique Pierre MAMBOUNDOU un co-gestion du pays mais le Président de l’Union du Peuple Gabonais (UPG) a été retrouvé mort le 15 octobre 2011 à son domicile ; en décembre 2011 des « législatives controversées » ont eu lieu et le projet de loi sur la Biométrie a commencé à montrer des insuffisances dans son application (identification et authentification de l’électeur).
Conclusion : le Gabon a accumulé trop de contentieux et il faut donc aplanir des contradictions intenables dans ce pays, avant qu’il ne soit trop tard. L’affaiblissement des normes éthiques, le discours ethnicisant ou la montée de la xénophobie plaident en ce sens.
3) UN COMPROMIS REPUBLICAIN NECESSAIRE
Si la Conférence Nationale Souveraine peut permettre (par défaut) en l’absence de « lois satisfaisantes » de donner un « contenu républicain » au vide actuel, alors, il n’y a aucune raison de ne pas l’accepter. Si la Conférence Nationale Souveraine décide qu’Ali BONGO peut terminer son actuel mandat, ce sera pour lui, l’occasion d’acquérir une « légitimité indirecte » et ce sera quand même au bénéfice de la majorité.
Mais Ali BONGO et son Gouvernement ne peuvent pas refuser de voir que la Conférence Nationale Souveraine pose comme il se doit, la question du « partage institutionnel » du pouvoir au Gabon. Ce partage concerne la Majorité Présidentielle, l’Opposition, la Société Civile et la Diaspora Gabonaise.
En principe ; Ali BONGO n’est pas en mesure de refuser une « relative légitimité » qui ouvrirait le Gabon à la paix, au compromis indispensable à l’unité d’une nation et à l’essor de l’économie. Le court et le long terme de la République Gabonaise annoncent des luttes et ce n’est pas heureux dans un environnement changeant.
4) MESURES DE PRUDENCE POUR UNE CONFÉRENCE SOUVERAINE
- PREMIÈRE MESURE : La Conférence Nationale Souveraine ne doit pas reposer sur les seules épaules de ceux qui ont été associés à la gestion du Gabon et doit favoriser l’arrivée d’une nouvelle génération d’acteurs car cette « Conférence » doit éviter de se transformer en réunion d’ anciens de la politique gabonaise ;
- DEUXIÈME MESURE : il ne faut pas, comme le suggère la Convention des Gabonais des la Diaspora, brader le côté « souverain » des résolutions de la Conférence Nationale ;
- TROISIÈME MESURE : la Conférence Nationale Souveraine ne peut pas éviter de poser la question des 2 corps d’armées qui caractérisent notre république depuis 1990 : une Armée Nationale et une Garde Républicaine.
Le Gabon a besoin de transformer son « Armée » en une véritable armée de métiers (à la lumière des évènements du nord – Mali) qui veille exclusivement sur les frontières nationales d’une part et d’autre part, qui assure vraiment la sécurité des biens et des citoyens gabonais.
Le Conférence Nationale Souveraine doit revoir le rôle de la Garde Républicaine et l’affecter à la seule protection des institutions de la République Gabonaise : le Président, le Gouvernement, les corps constitués mais aussi les élus et un certain nombre de Forces Vives de la Nation. La Conférence Nationale doit pouvoir éviter que la Garde Républicaine joue le rôle de l’Armée Nationale et celui de « gardienne » des institutions.
L’Armée ne doit pas avoir de parti prix dans le jeu politique : elle sert les élus et les intérêts du pays. C’est à ce titre qu’elle accorde la sérénité à l’ensemble des élus. Les chefs des partis doivent bénéficier de la sécurité de tous les élus.
QUATRIÈME MESURE : la Conférence Nationale Souveraine n’a pas besoin d’être longue comme en 1990 : un mois au lieu de deux suffira à tenir ces assises. Cela suppose que le problème de la « direction » de cette « conférence » soit posé le plus rapidement possible : il ne va plus de soi que la médiation d’une personnalité ecclésiastique soit indépassable.
Il faudra alors trouver dans la Société Civile ou dans la Communauté Internationale un « Président » issu d’un consensus ; d’autre part, la Conférence Nationale Souveraine doit régler le problème de « l’arbitrage des élections » : il faut un organe libre au Gabon qui ne sera pas rejeté. Cet organe différent de la CENAP pourra proclamer les résultats de toutes les élections. La Cour Constitutionnelle et le Ministère de l’intérieur se contenteront de prendre acte. De même, le dossier de la « Biométrie » devra être géré par l’instance en question.
CINQUIÈME MESURE : la Conférence Nationale Souveraine n’aura de sens que si un chronogramme est adopté rapidement : Gouvernement transitoire au Gabon pour animer les années post-Conférence Nationale Souveraine, programmation de la dissolution de l’Assemblée Nationale pour réorganiser les équilibres politiques en faveur d’une meilleure représentativité.
La Conférence Nationale Souveraine doit tout remettre à plat : les élections locales et municipales, les futures sénatoriales et les « présidentielles » de 2016. L’Assemblée Nationale du Gabon ne peut aller jusqu’en 2017. Après 3 années de pouvoir d’Ali BONGO, il est désormais clair que notre pays ne peut fonctionner en dehors de la co-gouvernance.
SIXIÈME MESURE : la Conférence Nationale Souveraine ne peut éviter de poser le problème de la dette politique du pays envers l’opposant historique et fondateur de l’UPG Pierre MAMBOUNDOU : il lui a été promis les postes de « Premier Ministre » et de « Vice-président » qu’il a accepté dans l’intérêt supérieur du Gabon mais il en est mort.
La réparation la mémoire de Pierre MAMBOUNDOU est un devoir : en dehors de la « loi sur la Biométrie ». Il s’est battu pour donner un « contenu juridique » au statut de vice-président pour le rééquilibrage des pouvoirs au Gabon : représenter le pays à l’intérieur et à l’extérieur ; en un mot : re-arbitrer et rééquilibrer en certaines circonstances
Un parti (l’UN) a été interdit mais un autre parti (l’UPG) est lésé depuis 1998 et l’Etat gabonais n’a même pas été en capacité d’honorer deux promesses garanties au niveau international. Pierre MAMBOUNDOU a géré de grands dossiers gabonais et son travail pour le pays est considérable. La Conférence Nationale Souveraine ne peut que réparer l’oubli et la négligence dont souffre la mémoire de Pierre MAMBOUNDOU avant 2016.
SEPTIEME MESURE : La Conférence Nationale doit clarifier le fait au Gabon et sur la base du passé qu’en politique, la nécessité « d’entrer en discussion » n’est pas assimilable à de « la compromission ».
La nécessité d’entrer en dialogue s’explique notamment par la nécessité d’intégrer les Nouvelles Générations », qui se sont sacrifiées et ne peuvent pas confirmer leur expertise au service du Gabon du fait des blocages politiques. Les « Forces Vives » du pays sont des toutes les ethnies et ont un point commun : elles sont exclues d’égale manière.
La Conférence Nationale Souveraine ne peut que tenir compte de l’intelligentsia nouvelle en exil qui se considère comme une « génération sacrifiée » car exclue de la gestion du Gabon, un pays qui a pourtant besoin de tous les citoyens gabonais. L’exil profond des Gabonais de l’extérieur doit être pris en compte.
En aucune manière, le débat sur Ali BONGO ou ses trois ans de présidence ne doit étouffer les vrais sujets comme la refondation du Gabon, la relance sociale et le retour de la sérénité en République Gabonaise.
Bruno Ben MOUBAMBA
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