dimanche 1 avril 2012

La Présidence de la Commission de l’Union Africaine doit revenir à l’Afrique du sud

Jean Ping a élu Président de la Commission de l’Union africaine (UA) le 1er février 2008 au premier tour de scrutin. L’actuel Président « intérimaire » de la dite Commission a derrière lui, une longue carrière élogieuse à biens des égards. Proche collaborateur de l’ancien Président Omar BONGO, ministre d’État, Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et de la Francophonie de la république du Gabon du 25 janvier 1999 au 6 février 2008, il a dirigé plusieurs ministères, et non des moindres. Toutefois, le mandat de Jean PING aura correspondu à la fin du « rêve de Syrte » (en Lybie) : l’idée d’émergence d’une puissance africaine et de l’Afrique comme « Civilisation » à part entière.

1. L’HOMO AFRICANUS

Reprenant les philosophies d’Engels ou d’Hegel (l’Afrique noire n’a pas d’Histoire), certains théoriciens ont clairement décidé depuis de nombreuses années que l’homo africanus n’était pas dans l’Histoire et les choses se sont passées comme d’habitude, depuis cinq siècles : ambitions des grandes puissances, rivalités géopolitiques entre grands pays du monde et partage du gâteau africain. Le plus étonnant est que, ceux qui gouvernent l’Afrique, avec des méthodes d’un autre âge, n’aient pas anticipé tout cela mais aient choisi de coller aux stéréotypes qui empêchent la renaissance de la « civilisation africaine » en tant que puissance partenaire du monde mais exigeante quand à ses propres besoins. Ce ne sont ni les moyens humains, ni les ressources financières, ni les matières premières et ni les dispositifs institutionnels qui ont manqué mais tout simplement le courage politique de le faire.

Pour ne pas avoir réalisé que le temps du courage et du sacrifice de soi était revenu au bout de 50 ans d’indépendances discutables, le mandat de Jean PING en tant que Président de la Commission Africaine était compromis avant même d’avoir commencé. Le volontarisme ne suffit pas quand le courage fait défaut. Oui, Omar BONGO aurait voulu que son volontarisme pacifiste soit incarné à ADDIS-ABEBA par Jean PING, un de ses fidèles lieutenants. Il a mis les moyens pour cela mais le monde change et le temps n’attend personne. Certes la Libye a affiché sa volonté d’unifier l’Afrique à Syrte mais les leaders africains sont rapidement retombés dans le folklore habituelle des Africains tel que symbolisé par cette incroyable cérémonie autour de laquelle, des « rois africains » ont fait du Guide libyen le « roi des rois » en Afrique. Etait-ce bien utile ?

2. L’UNION AFRICAINE DOIT ÊTRE REFONDEE

A l’exception de pays comme l’Ethiopie, le Rwanda ou l’Afrique du sud, rares sont les pays qui auront compris à temps l’importance de la puissance militaire pour les états africains (non pas tournée contre les peuples mais pour défendre les états et les peuples) ou encore l’importance des critères de convergence politique, économico-financière, culturelle et sociale pour qui veut édifier un « nouveau monde » dans des temps incertains. Pour conduire les peuples africains vers un avenir meilleur, il ne suffit pas de savoir organiser des sommets pompeux ou de porter beau le costume trois-pièces, de rouler des mécaniques aux côtés des puissants de la planète (qui n’en pensent pas moins sur l’homo africanus) ou prononcer de longs discours ennuyeux qui sonnent faux, de recevoir les récompenses habituelles du bon nègre et de la médaille (Prix de ceci ou Grand Croix de cela) ou de savoir parler comme des livres uniquement. La qualité qui manque à ceux qui gouvernent l’Afrique n’est-ce pas plutôt le courage et donc la morale ou plutôt une certaine éthique de la responsabilité ?

Il est totalement irresponsable d’avoir des dirigeants à la tête de l’Afrique qui ne travaillent pas à promouvoir une certaine morale en politique : démocratie, droits de l’Homme, justice sociale, co-gouvernance interne, critères de convergence réelle entre les états, bien public, politiques publiques, protection efficace des populations, indépendance énergétique, infrastructures, échanges interuniversitaires, logement social, lutte contre la faim, …etc. Il est inutile de continuer de travailler avec des leaders qui n’en sont pas ou qui ne fonctionnent qu’avec la peur de X ou de Y, la menace ou le crime en permanence. Ceux qui sont prêts à livrer l’Afrique à la prédation universelle pour peu qu’eux-mêmes soient assis au bout de l’échelle de la chaine alimentaire africaine sont peut-être les vrais co-fossoyeurs des rêves africains.

3. APRES L’EFFONDREMENT DE L’ETAT LIBYEN

Si pour le XXIe siècle les choses sont définitivement mal engagées pour les Africains, il appartient à cette génération de réaliser qu’elle a le devoir de se battre pour que les générations du siècle à venir aient un meilleur destin car pour certains, il est peut-être déjà trop-tard. Tous les acteurs africains de ces 50 dernières années ont comme fermé les portes du bonheur possible pour 1 milliard d’Africains. Les prochains 1,5 ou 2 milliards d’Africains ne pourront pas supporter la souffrance sans fin et tout deviendra possible.

Après l’effondrement de l’état libyen concomitamment au régime de Kadhafi, peut-on reprocher sérieusement à l’Afrique du sud de vouloir jouer les premiers rôles à la tête de la Commission de l’UA ? Les circonstances l’obligent peut-être. Le Gabon se trompe en voulant faire dans l’orgueil patriotique : soutenir Jean PING par-delà les intérêts de la puissance africaine. Cela risque d’affaiblir sa diplomatie pour des années. Le Gabon à tout à perdre dans son bras de fer avec le pays de Nelson MANDELA. Il faut avoir des arguments autres que techniques pour refuser de regarder la vérité dans les yeux : l’Afrique va mal, très mal. Quels sont les moyens dont disposent le Gabon et M. Jean PING pour tenter de redresser la barre.

Politiquement, la « diplomatie généreuse » au plan financier, semble avoir vécu depuis 2009, le Gabon n’étant plus l’épicentre d’une certaine façon de faire de la politique en Afrique depuis que le Président Omar BONGO est décédé. Economiquement, c’est la Guinée Equatoriale avec ses 40 % des parts de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC) qui fait la loi désormais et non le Gabon. Ce dernier n’a d’ailleurs aucun moyen de savoir combien de litres de pétrole sortent de son sous-sol et ce sera pire avec les hydrocarbures qui sont en eau très profondes.

Militairement, le Gabon n’existe pas. Sa sécurisation et son action dépendent d’autres facteurs.

Dans toute cette apocalypse africaine, quel est donc le pays qui semble tenir la route si ce n’est l’Afrique du sud de Nelson Mandela ? Le Gabon se trompe en voulant faire obstruction à la nouvelle volonté des Sud-Africains de vouloir diriger une Union Africaine (UA) désormais dans un coma avancé. L’UA est sur un chemin qui ne mène nulle part : elle a été inexistante dans les dernières crises qui ont secoué le continent, il est donc normal qu’un grand pays démocratique comme l’Afrique du sud veuille diriger la Commission de l’UA, alors même que l’indépendance de l’Afrique est remise en question et que des ambitions civilisationelles se sont sentir, y compris de la part de l’Arabie Saoudite.

L’Afrique du sud est dotée d’une Gouvernement stable, d’une économie performante et d’une armée capable de sécuriser un certain nombre de crises. Elle mérite que les Africains lui confient leurs destins, même de manière provisoire. Si l’Afrique du sud veut présider la Commission de l’UA, le Gabon ne doit plus s’imposer à cela car c’est l’intérêt partagé des peuples africains, face aux nombreux périls de l’heure. Les présidents Ali BONGO et Jean PING sont assez intelligents pour comprendre que les temps ont changé.

Bruno Ben MOUBAMBA.

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