L’unité de l’opposition gabonaise est à mon avis une chose impossible. Elle n’est pas impossible tellement par une différence de programme politique que par le caractère et le comportement des leaders, des cadres des différents états-majors politiques et leurs militants.
Ailleurs, la religion ou les ressources économiques constituent un principe essentiel des différenciations sociales. Dans mon pays, la politique est l’instrument d’identité et d’appartenance sociale. Les opinions que l’on exprime sont à cet égard les clefs qui ouvrent ou ferment les portes des cloisons qui séparent politiquement les Gabonais aujourd’hui de façon étanche.
En fait, les comportements politiques et les systèmes d'opinions et d'attitudes qui leur sont associés sont fortement dépendants d’une appartenance objective et subjective à un groupe sociopolitique. On trouve ainsi, le groupe émergent, le groupe unioniste, le groupe upégiste, la diaspora d’opposition (elle-même divisée en sous-groupes) les non-alignés, les perdus, les trouvés, les embrouillés, les laissés pour compte et les non classés. Chacun croit dur comme fer qu’il a la solution, la stratégie inédite, les moyens de ses ambitions pour prendre le pouvoir. Les pauvres imbéciles enchevêtrés dans leur égo non pas encore compris la dynamique du pouvoir gabonais et de sa capture. Pauvre Gabon! Unis dans la concorde et la fraternité. Quelle ironie!
À l'origine de ces comportements politiques égoistes, ce sont les croyances et les convictions, les implications affectives, la représentation du champ social, les systèmes de normes et de valeurs caractéristiques notamment de l’opposition aux anciens ténor du parti au pouvoir devenus opposants; à l’opposition classique de la fin des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix qui ont passé leur temps à abdiquer et à jouer dans la complaisance et la compromission; la colère contre le parti au pouvoir et à l’estime que les uns et les autres ont des leaders politiques de l’opposition et de la considération sur le leader susceptible de chasser le parti démocratique gabonais du pouvoir.
L'emprise de ces structures symboliques est largement tributaire de l'identité et de l’engagement politique de l’ensemble des Gabonais. L'analyse de données collectées entre 2009 et 2012 et sa confrontation avec des opinions politiques que nous relevons sur Facebook montrent à la fois le profond enracinement culturel des systèmes d'attitudes ainsi constituées et leur évolution, inséparable de l’identité de la société gabonaise depuis l’élection présidentielle anticipée de 2009.
Face à un contexte où le parti démocratique gabonais veut garder un indéfiniment le pouvoir, les cloisons d’identités sociopolitiques qui séparent les Gabonais sont des instruments qui le faciliteront toujours la tâche. Aucun chef de clan ne veut céder à l’autre le privilège de conduire la charge contre le pouvoir, chacun se disant plus légitime que l’autre. Les idées que l’un propose est à l’opposé de ce que les autres veulent faire. Ce que l’on observe entre les groupes politiques, entre les leaders politiques est la même chose qui se passe entre les cadres des différentes formations politiques et même au niveau des simples militants. L’égo est le fondement qui caractérise notre être politique commun.
JMN
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