dimanche 16 décembre 2012

Union des Forces de l’Alternance, encore une autre association politique de quartier?

Union des Forces de l’Alternance, encore une autre association politique de quartier? En quoi cette nouvelle trouvaille apporte-t-elle quelque chose de nouveau dans le marasme dans lequel se trouve l’opposition politique aujourd’hui au Gabon?

Rien.

Peu importe le nom qu’elle voudra se donner, l’opposition politique du Gabon doit sortir une fois pour toutes de ces regroupements de pleurnichage et de lamentation de ce qu’Ali a fait ou n’a pas fait.

Si les acteurs qui président ces partis politiques sont séreux dans leur volonté de s’unir pour en finir avec le régime en place, qu’ils ne se contentent pas par des mots creux à parler d’une union sans réel effet au plan de la conquête du pouvoir.

La seule voie qu’elle peut emprunter pour convaincre les Gabonais est celle conduisant à constituer un véritable parti politique de l’opposition : une structure fédérative des partis politiques avec des dirigeants élus par les militants et un programme de société prenant appui dans la volonté d’émancipation des Gabonais.

A quels besoins peuvent bien répondre aujourd’hui des partis politiques d’un individu, d’une famille, d’un clan, d’une région du pays même en entrant dans des unions de façade?

Si Ali Bongo a eu peur de l’Union Nationale, c’est parce que l’idée qui a fondé ce parti était justement le dépassement d’un individu, d’une famille, d’un clan, d’une région du pays. Malheureusement, certains membres de ce parti, encore nostalgiques de l’ère Bongo Omar n’avaient pas compris qu’il fallait instaurer un contexte militant nouveau, y faire vivre un processus démocratique d’envergure a la vie militante comme aux structures organisationnelles du parti. Peut-être, aurions-nous ainsi évité des décisions d’une personne ou d’un directoire tout puissant et illégitime, puisque non désigné par la base militante.

Il faut à l’opposition politique gabonaise d’entrer dans une reconfiguration qui dépasse ces blagues d’union politiques d’individus. Nous voulons un seul parti de l’opposition réelle avec des leaders élus par tous les Gabonais.

JMN

jeudi 13 décembre 2012

Des pleurs comme des fleurs ….

Des pleurs comme des fleurs ….

Petit, j’ai bénéficié d’une tendresse infinie de la part de ma sœur, la fille aînée de ma tante. Je crois que c’est cette affection prodiguée dans mon plus jeune âge qui fit de moi cet être attentif aux autres et qui veut le bien pour tous. Ma grande sœur était une personne remplie d’empathie pour les gens de son entourage. Malgré la colère qu’elle pouvait à l’occasion entretenir contre ceux qui avaient eu le tort de l’offenser, elle était animée d’une profonde bonté et d’une profonde humanité. Par ses manières, elle a su me communiquer son humanité et l’esprit de sa bonté.

Quand je vins au monde, elle venait de perdre son premier fils. C’est tout naturellement que convié à ses bons soins, lorsque ma mère vaqua à des occupations prenantes, que j’allaitai son sein. Cette activité avait créé une certaine affiliation fusionnelle entre elle et moi. La maternité allaitante par défaut à laquelle elle se voua à quelques occasions par le hasard des occupations de ma mère aurait dû l’amener à me traiter comme son fils. Elle ne me voyait pas comme cela. Je fus un compagnon de vie, un ami intime, presque une âme sœur.

Enfant ou adolescent et même au début de ma vie adulte, je ne réalisai pas la profondeur de cette relation fusionnelle qui existait entre ma sœur et moi. Jusqu’à son dernier soupir, dont je n’ai expérimenté l’expression que par le récit des autres membres de notre famille, je n’avais jamais pris la mesure de son affection pour moi, pas plus que je n’avais été amené à mesurer celle que j’avais de façon inconsciente à son égard. Aujourd’hui, rien qu’à l’évocation de son souvenir, je souffre encore terriblement de cette absence arrivée trop tôt dans ma vie.

Lorsqu’à l’été 1989, je l’annonçai mon voyage pour poursuivre mes études en Amérique du nord, elle crut d’abord à une blague. Elle me regarda avec ce sourire et cet air interloqué qu’elle savait afficher avec élégance pour me dire ne prend pas tes rêves pour la réalité. Néanmoins, par le sérieux que je mis à mon visage, elle arrêta l’exécution des tâches qu’elle accomplissait pour examiner avec un regard inquisitoire ce papier de mon admission à l’école polytechnique. Tu es sérieux alors, m’avait-elle interrogé, avec un sourire mêlé de fierté et de confusion. Je répondis oui. Elle se retourna et me fit dos. Un long silence s’était installé entre elle et moi. On aurait cru entendre les mouches voler tellement ce silence était si profond.

Derrière son dos, d’où je me tins, je tentai de voir le profil de son visage pour déchiffrer son expression. J’étais inquiet. Je craignis qu’elle oppose un véto. Son assentiment était essentiel à la réalisation de ce projet. Puis, quelques instants après, sans doute de méditation, elle se retourna. Elle me fit face et me regarda longuement avec admiration. Les traits subitement adoucis de son visage me laissèrent croire que j’étais la personne la plus importante de sa vie, que nous étions qu’une même personne et qu’un tel départ était pour elle une souffrance. Mais comme pour faire tort au fruit de mes pensées, elle dit, j’ai toujours su que c’est toi qui nous sortiras de la misère. Elle voulait par cet aveu dissiper ses craintes de mon départ et se donner raison de ne pas interdire la poursuite de mon projet d’étude à l’étranger.

Avec ce geste d’affection qui n’existe qu’entre une mère affectueuse et son fils bien-aimé, elle s’approcha de moi, comme pour murmurer ce qu’elle ne voulait que personne d’autre n’entende. Elle me prit dans ses bras et me serrant contre elle. Elle chuchota qu’elle allait souffrir de mon absence et que je ne la retrouverais plus à mon retour de ce voyage dont elle perçut la durée une éternité. Elle était au milieu de la trentaine. Je ne comprenais pas ce qu’elle voulait dire par je ne la retrouverais plus à mon retour. Puis, après cette confession qu’elle livra avec une voix qui étouffait un torrent de sanglots, elle se détacha de moi.

Désorienté par ses paroles, je reculai de trois pas comme pour bien la regarder. Dans mon examen, je contemplai les larmes que la fermeture et l’ouverture délicate de ses paupières laissèrent échapper délicatement. Elles étaient pleines de tendresse et de regrets. Je lis comme un adieu, le détachement difficile que l’on vit quand on sait qu’on ne retrouvera jamais plus la personne qui nous quitte. Même si à ce moment-là je pus lire la peine de la séparation qui se profila, c’est que longtemps après que je pris réellement la mesure du poids de ces larmes nobles. Car les événements qui survinrent après mon départ ont profondément détruit notre clan. Le décès prématuré de ma grande soeur en a été le fcateur de précipitation de ce qui couvait depuis plus de deux générations.

Des fleurs comme des pleurs est le récit avenir de la destruction de mon clan maternel. On y trouvera les ingrédients de ces histoires bantoues par lesquelles des familles entrent dans des tourments, se déchire par la jalousie, par les accusations de sorcelleries. On y verra à l’instar de la famille que ce sont ces mêmes déchirements alimentés par le mauvais esprit qui affectent la société gabonaise dans son ensemble.

JMN

vendredi 7 décembre 2012

Si je n’avais été vilipendé à tort, j’aurais gardé le silence.


Dans mon travail, en tant que secrétaire exécutif de la CDG, j’ai été commandé de produire des scénarios de travailler pour examiner les différentes options du changement politique au Gabon. Dans le texte ci-dessous un de ces scénarios est présenté. Il avait été envoyé par courriel à cinq membres de la CDG comme élément de discussion à l’interne entre ces cinq personnes avant le proposer à l’ensemble des membres de la CDG. Depuis, celui-ci a été transféré à quelques compatriotes et aux autorités politiques françaises du ministère des affaires étrangères et à l’Élysée, la cellule Afrique, dans le but de me présenter comme une personne qui veut entrainer la violence au Gabon. Il est même dit que j’avais sollicité de l’argent pour aller mener une insurrection à partir d’une des frontières gabonaises. La gabonitude c’est quelque chose.

Pourtant, il a été fait signification, à ceux qui furent reçus au quai d'Orsay sur la rive gauche de la Seine dans le VII arrondissement de Paris dernièrement, que la France pas plus que les États-Unis d’Amérique et la communauté internationale ne soutiendront l’idée de la CNS. Lors de mon séjour au Gabon à la demande de la CDG, le conseiller politique de l’ambassade des États-Unis d’Amérique avait également été formel sur le non-soutien des États-Unis d’Amérique à ce projet. De la même façon injonction avait été donnée à quelques compatriotes d’un certain parti politique de prendre leur responsabilité au regard de l’ultimatum donné à Ali Bongo par rapport à l’objet de la CNS. Voilà pourquoi le mot d’ordre attendu de l’affrontement n’avait pas été donné aux militants assoiffés d’en découdre avec le système Bongo-PDG. D’ailleurs, dans son allocution d’inauguration de la nouvelle embrassade des États-Unis d’Amérique au Gabon, l’ambassadeur a été très clair en disant que son pays ne travaillera qu’avec une opposition responsable.

Dans le premier cas comme dans le troisième, les injonctions de la communauté internationale et de leur non-soutien à l’objet de la CNS n’ont pas fait écho. Malgré ces faits bien connus, certains font-ils leur vedettariat dans les médias et les réseaux sociaux pour annoncer des choses dont ils savent d’avance qu’elles ne se feront pas. Une autre façon de tuer un peu plus les espoirs des Gabonais. Je publie donc ce texte non pas pour faire l’apologie de la violence, mais pour faire cesser la propagande malveillante et ces faux messages.

Scénario de travail 3 :

Il y a consensus au sein des observateurs nationaux et internationaux non partisans que notre pays est gouverné depuis 1967 selon certains par une dictature alors que d’autres parlent d’un régime antidémocratique en ce sens qu’il accapare l’ensemble des institutions de l’État de sorte que toute alternance par les urnes est impossible.

Pour cela, même s’il tolère la pluralité des partis politiques il s’oppose au fonctionnement démocratique du pays. Le pluralisme politique ne sert alors que de couverture pour mieux camoufler l’absolutisme politique. Car en vérité, dans notre pays le chef de l'État détient tous les pouvoirs politiques.

De fait, il n'est réellement assujetti à aucune loi et gouverne sans contrôle. Son pouvoir est lié à sa personne, ce qui le rend omnipotent. Étant souverain de toutes les décisions et les actions de gouvernement de la communauté nationale, il n’est redevable de ses actions qu’à lui-même. Ce qui fait de nous ses sujets. Une condition politique inacceptable.

D’abord parce que dans une société où le gouvernement exerce un pouvoir absolu, aucun progrès sociopolitique n’est possible. De plus, les conditions de vie qu’il impose à la société sont la cause de toutes les souffrances des individus : crimes politiques, crimes économiques, crimes rituels, crimes rituels, etc.

En tant qu’universitaires et citoyens vivant à l’extérieur du pays bénéficiant de certaines facilités, il nous revient le devoir de mettre fin aux souffrances de nos frères et sœurs et de convenir pour cela de moyens de résolution du problème de la gouvernance actuelle de notre pays.

Après mures réflexions, il m’apparait que le changement politique souhaitable au Gabon ne peut s’opérer que par le renversement du régime en place. Ce renversement ne viendra pas d’un mouvement de militantisme partisan, mais bien par des actions violentes remettant en cause l’ordre politique établi.

Pour ce faire, la violence pour la violence ne pouvant rien n’apporter de ce que nous souhaitons, il nous faut une structure de fonctionnement et de visées politiques capables de concevoir ce qu’il convient de faire dans un premier temps, dans un second temps comment le faire et dans un troisième temps de mettre en œuvre les actions du renversement du régime.

Il faudra dans un premier temps donc penser à la mise en place d’un comité pour le renversement du régime. Il devra être composé d’au plus une quinzaine de personnes. Il regroupera des opposants au régime qui cherche à le renverser quels que soient les moyens. Les Membres du Comité de Renversement (MCR), potentiel pouvoir exécutif de transition ne devra admettre en son sein que des personnes d’une grande intégrité politique plaçant les intérêts supérieurs de la nation au-dessus de leurs propres intérêts. Ils devront également faire preuve d’une certaine indépendance financière et contribuer dans une certaine mesure financière ou matériellement au projet du renversement.

Les MCR doivent poursuivre les objectifs ci-dessous :

• La liberté politique et le peuple comme seul souverain de la gouvernance de la communauté nationale ;

• Les citoyens choisissent le Parlement et celui-ci choisit le gouvernement qui exercera le pouvoir politique.

• La liberté des partis politiques dans le cadre des lois pour leurs activités ;

• Développement sociopolitique dans la quête du bien-être pour tous les citoyens

• Égalité de tous devant la loi en respectant le principe de liberté sur la base des droits de l’homme ;

• Système d’économie libérale, mais sous le contrôle du gouvernement d'État ;

• Le contrôle des ressources naturelles et de leur exploitation par l’Assemblée nationale.

Le MCR vise renversement du régime en place par le harcèlement du gouvernement et de l’autorité politique en place de même que des opérateurs économiques qui soutiennent ce régime. Le harcèlement est essentiellement fait d’action de sabotage et de destruction des symboles politiques et économiques du régime.

Le MCR envisage de diriger le pays durant 12 à 48 mois en attendant la mise en place d'élections libres. En outre, et dans l'optique de la tenue des élections, tous les Partis seraient libres et autorisés de faire campagne.

Trois consultations nationales sont envisagées une fois le pouvoir actuel destitué :

1. Référendum portant sur le type de régime à adopter pour le pays ;

2. mise en place de l'Assemblée constituante chargée de rédiger la nouvelle Constitution ;

3. Élection du Parlement et désignation du gouvernement qui en sera issu.

Pour que le MCR parvienne à atteindre les objectifs convoités, il faut qu’il dispose de moyens d’action d’une certaine importance. Il me semble que deux millions d’euros seront suffisants. La question à se poser est pouvons-nous la réunir ? Parce que, sans financement, il est impossible d’y parvenir. Je vous laisse lire l’article de Jeune Afrique ci-dessous.

jeudi 6 décembre 2012

Il fallait réviser le processus du projet de la CNS


J'ai écrit cette lettre le 31 octobre 2012, alors que j'étais secrétaire exécutif de la CDG dans le cadre des scénarios de travail pour susciter le cangement politique au Gabon.

Bonjour,

Je vous prie de me lire avec une attention soutenue.

Scénario 2

Il faut revisiter l’idée et le projet de la Conférence nationale Souveraine.

Soyons lucides. À l’heure actuelle, tout indique que la Conférence Nationale Souveraine ne se tiendra pas. Nous nous dirigeons vers une impasse. Il faut reprendre l’initiative pour que le travail qui a été entamé ne tombe dans les oubliettes. Il faut redéfinir ce que ce projet doit être et comment parvenir à faire en sorte qu’il voit le jour dans un très bref délai.

En premier lieu, il convient de dire que l’opposition pour l’opposition n’apporte rien. C’est comme cela que ce projet est vu en ce moment par les citoyens qui ne s’intéressent pas aux débats rhétoriques. Ils observent ce qui se dit en leur nom avec désinvolture. Le discours de l’opposition apparaissant comme du réchauffé.

Pour faire preuve de crédible et mobiliser pour les changements convoités, l’opposition doit montrer dans ses discours qu’elle se préoccupe des conditions de vie des Gabonais non pas dans cette dénonciation des manquements du système PDG-Bongo, mais dans la conceptualisation et l’offre d’un projet de société qui soit à la hauteur d’effacement des prétentions que les tenants du pouvoir véhiculent.

En effet, nul Gabonais n’ignore que la vie de la plupart des compatriotes est calamiteuse et que cette condition misérabiliste est le fait d’une mauvaise gouvernance, des crimes politiques, des crimes économiques, des crimes sociaux et des crimes rituels. Il faut certes les dénoncer, mais dans une perspective de proposition d’une société nouvelle incarnant à la fois des valeurs nouvelles puisées dans nos traditions et des pratiques de gouvernance qui valorisent la citoyenneté, qui font la promotion des valeurs démocratiques, qui montrent le respect de la vie humaine et qui promeuvent le respect des libertés individuelles et l’esprit d’entreprenariat créatif.

Pour cela, le projet de Conférence Nationale qui a été mis de l’avant par la diaspora, la société civile et l’opposition ne doit pas être abandonné ou conduit à l’abattoir faute d’une lecture intelligente de l’état d’esprit de nos concitoyens. Il doit aller de l’avant avec un agenda nouveau. Elle gardera son caractère souverain parce qu’elle ira puiser son essence dans les revendications non pas seulement politiques des populations, mais ce besoin du mieux-être économique, social et culturel.

Ainsi, à l’exclusion du parti au pouvoir, elle regroupera tous les partis politiques et conduira à la naissance d’une seule force politique qui pourra héberger de nombreux courants politiques divers dans leurs idéologiques socio-économiques, mais une uni dans cette quête d’une alternative institutionnelle et gouvernementale.

Le projet de société dont sera porteuse cette formation politique nouvelle sera l’élément mobilisateur qui devra évincer le système politique Bongo-PDG sans violence. Aussi, il est essentiel de comprendre que tout projet de société se doit d’abord de coller au plus près aux réalités de notre société. Il sera par conséquent construit telle une réponse articulée aux difficultés que les citoyens vivent quotidiennement et un levier pour soulever les obstacles sociopolitiques qui font ombrage à l’épanouissement de la Nation.

Dès lors, la Conférence Nationale Souveraine sera le cadre du débat de la définition de l’avenir politique du Gabon comme les participants la concevront.

En regroupant toutes les forces de l’opposition, tous les acteurs de la société civile, les acteurs économiques, les investisseurs potentiels internationaux, la Conférence Nationale Souverain sera donc l’occasion de tout remettre à plat pour l’érection d’un cadre politique, économique, culturel et social attendu de tous.

 

mercredi 5 décembre 2012

Du désengagement de la lutte politique

La vie politique dans l’opposition au Gabon est d’un contraste saisissant. Aux spectacles des discours légitimes de dénonciations d’un pouvoir arbitraire qui entraîne des luttes tragiques et des luttes comiques, répond un labyrinthe des calculs malicieux, le cheminement discret, mais malveillant des projets muris dans le secret et les combines de chefs de clan. De même, aux déferlements rhétoriques du langage politique engageant, on y retrouve des discours tantôt enflammés tantôt insipides, toujours prolixes, mais tous rarement vrais. Tous, pourtant faits pour engager lourdement le destin collectif.

Certains comme des mystiques en religion pour susciter la foi aveugle, entraînent quelques-uns dans l’arène, avec la psychologie du gladiateur, décidés d’en découdre avec l’ennemi sans que la cause du combat ne soit clairement délimitée dans les gains de la lutte engageante. Ne faut-il pas une raison pour haïr et une finalité dans la bagarre?

Entre les pôles extrêmes, de la ligne des opposants, évoluent activistes professionnels et dilettantes, militants de partis politiques engagés et militants occasionnels, poètes de la misère et sauveurs du monde, pragmatiques de la raison politique et fanatiques de l’intolérance ethnique. Tous à leur manière, révélatrices des multiples conceptions de la cause de cette lutte, s’adonnent à cœur joie de dénoncer le mal dont la plus part ont pris malin plaisir à édifier directement ou indirectement à travers leurs lignées et ou amis et; à invoquer des vertus dont les comportements dans la lutte n’affichent en rien les percepts.

Rien d’étonnant que l’on lise dans les volontés d’actions ces disparités qui affaiblissent le mouvement collectif dans la lutte. À cause de ces contrastes, l’opposition politique gabonaise entraîne les citoyens, par désabusement, à s’inscrire dans les listes des spectateurs, diversement attentifs, pour verser dans une profonde ambivalence de sentiment à l’égard de l’objet et de la nature de la lutte. Le regard de la majorité des Gabonais à l’égard de la lutte politique au Gabon l’atteste éloquemment. Il est un langage d’indifférence dans la différence des genres qui s’emploie à parler différemment de ce qui communément ne saurait être un fait d’individualité.

Toute une tradition fait ainsi de la lutte politique au Gabon depuis trente ans non pas un combat des idées et des valeurs ou encore un combat au service de la communauté, mais un combat pour soi en soi.

Aristote avait pourtant justifié la société esclavagiste par la nécessité pour les hommes éclairés de consacrer aux deux seules tâches vraiment dignes : la philosophie et la politique, le plus claire de leur dévotion pour le bien. L’une pour dire les choses dans la mesure de la vertu et l’autre pour l’action par laquelle le pouvoir est recherchée ou conquis en vue du bien de la multitude. Aristote en est même venu à définir la politique comme l’art du gouvernement des hommes.

Certains n’ont pas compris que cette gouvernance n’est pas effective que lorsqu’on est aux commandes de l’État. Elle est aussi dans la manière de cette marche pour accéder aux commandes de l’État. Il ne faut pas croire qu’en boitant avec ce rythme qui fait que l’on met difficilement un pied devant l’autre, que l’on serait porté à croire à la victoire possible contre celui qui a la cadence du rythme naturel dans sa démarche. Par ce geste démocratique, dans la quête de la vertu, dans notre geste citoyen, le peuple serait moins porté à parier pour la victoire du boiteux si le destin collectif dépendait de sa victoire dans la course face à celui qui sait user de ses deux jambes.

À ne point douter, malgré l’immensité de leur ignorance ou de leur inattention à la portée des actes et des discours, fort explicable au demeurant de bien diverses manières, les spectateurs de la vie politique gabonaise soupçonnent confusément la distance qui sépare les ambitions réelles des acteurs (des plus mesquins aux plus respectables) et les rationalisations embellissantes qu’ils en fournissent pour faire croire à l’intérêt collectif de l’engagement politique. Ne nous trompons pas, aucun des discours fait maintenant est de nature à susciter la défection dans les listes spectateurs pour alourdir celle des acteurs engagés. Longtemps encore, la plupart des Gabonais seront spectateurs de leur propre destin. La faute est à attribuer au philosophe et au politique, cette élite limitée dans ses capacités à devenir vertueuse.

Il faut, nous semble-t-il pour revendiquer la démocratie et obtenir du peuple crédit de sa crédibilité; être d’abord un démocrate dans la totalité de ses comportements et de ses discours. De plus, ce qui est une chose plus qu’élémentaire!

Joël Mbiamany-N'tchoreret