jeudi 17 février 2011

MEMORANDUM DE LA SOCIETE CIVILE GABONAISE SUR LA SITUATION SOCIO-POLITIQUE

PREAMBULE

Le feu Président BONGO ONDIMBA dans son discours testamentaire du 02 Décembre 200, a été clair en ce qui concerne son bilan à la tête de notre pays « Le sentiment qui s’exprime en chacun de nous est que notre pays le Gabon, et nous-mêmes, méritons mieux. » et de poursuivre « Arrêtons de nous comporter comme si nous étions juste de passage au Gabon comme si nous avions une patrie de rechange ailleurs … Je ne crois pas que faire mains basse sur l’argent destiné à construire les route ou le rendre indisponible soit profitable au Gabon ou aux Gabonais. Je refuse de croire que le manque de médicament dans nos structures sanitaires, malgré les budgets importants qui sont alloués tous les ans n’est pas du aux détournements. Je reste persuader que si chaque franc que l’Etat a consacré à la construction, à l’équipement et à l’entretien des établissements scolaires n’avait pas servi à faire la fortune de certains, notre pays se classerait au tout premier plan dans le domaine de l’éducation, je continue de croire que le Gabon peut disposer d’un meilleur réseau de transport en commun à condition que l’argent qui est consacré soit disponible à cette fin… ».

C’est cette gestion calamiteuse qui est responsable de tous les maux actuels dont souffre notre société, maux que le Président BONGO a fermement condamné dans le même discours « L’Etat doit inspirer confiance assurer et rassurer par son dynamisme, dans tous les secteurs d’activités relevant de ses compétences, cet Etat est actuellement affaibli par : l’ethnisme, le clientélisme, l’affairisme, la corruption, la politisation outrancière et le népotisme qui ont gangrené les pouvoirs publics … ».

Ce comportement des dirigeants a abouti à l’apparition d’une fracture sociale entre une classe politique corrompue, repue, riche, insensible, ambitieuse et déconnectée des réalités sociales et un peuple de plus en plus pauvre, résigné et dégouté de la chose politique.

Toute chose qui a amené le Président de la République à conclure que « Dieu ne nous a pas donné le droit de faire du Gabon ce que nous sommes en train d’en faire … ».

Le décès du Président BONGO est survenu dans une période caractérisée par une fracture sociale sans précédent, une fronde sociale de plus en plus grandissante, une détérioration de plus en plus insoutenable des conditions de vie de la large majorité des Gabonais.

Pour le peuple, cet événement constituait une occasion de réconciliation, le début d’un nouveau départ et l’espoir d’un engagement national et patriotique.
Cet engagement s’est matérialisé par une forte participation des gabonais aux différentes opérations de vote et à la déclaration d’une trentaine de candidatures à l’élection présidentielle anticipée d’aout 2009.

A travers cette élection, le peuple Gabonais s’était fixé deux (2) principaux objectifs :
1. Mettre à la tête de l’Etat un homme ou une femme qui saurait l’écouter, le comprendre, capable d’insuffler un mouvement de développement harmonieux du pays dans un environnement de Paix, de Stabilité, de Justice Social et de Liberté ;

2.Se réconcilier avec son élite politique et ses institutions à travers l’organisation d’une élection présidentielle libre et transparente conforme au Principe Constitutionnel qui guide notre république à savoir « le Gouvernement du peuple, par le Peuple et pour le peuple » Article 2.

Malheureusement cette élection présidentielle, au départ porteuse d’espoir, a plutôt accentué ce clivage de part son organisation et surtout de part la manière dont les institutions de régulation de la démocratie ont géré la campagne électorale, la centralisation des résultats et le contentieux post-électoral.
La crise de confiance issue de cette élection a atteint son niveau le plus élevé. Les deux camps politiques ne se regardant qu’en chien de faïence : le dialogue s’est rompu.

Cette crise a pris une tournure encore plus alarmante avec la prestation de serment de M. André MBA OBAME comme président de la République et la mise en place d’un gouvernement alternatif réfugié depuis le 25 janvier 2011 dans les locaux du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) à Libreville.
Aux yeux du Peuple gabonais, cet acte est annonciateur d’une crise encore plus profonde et d’une instabilité à venir.

Au-delà des considérations partisanes qui conduisent certains à préconiser la répression tous azimuts pour en sortir et les autres à amplifier les effets afin d’aboutir à une situation d’insurrection, il convient de rechercher les causes profondes de cette situation et y apporter des réponses idoines susceptibles d’instaurer un véritable climat de paix et de stabilité du pays.

Par ailleurs la grande crise sociale, mise en veilleuse par les syndicats et le gouvernement à la veille du décès du Président BONGO ONDIMBA, reste toujours d’actualité.

Aussi, tenant compte de ces considérations générales , de la nécessité impérieuse de prévenir tout dérapage susceptible de compromettre durablement la paix sociale, l'unité nationale et les acquis essentiels de notre histoire récente et aussi de l’urgence d’amorcer un mouvement de développement national profitable à tous ,un sursaut national s'impose.

Ce sursaut interpelle l’ensemble des forces sociales (partis politiques, syndicats, ONG, associations, communautés religieuses pour redéfinir les fondamentaux de notre République et construire une démocratie et un Etat modernes seules capables de nous éviter, à court ou moyen termes, de sombrer dans les affres d’une instabilité chronique.

Le présent mémorandum, élaboré à l'initiative des organisations de la Société civile entend répondre à cette exigence citoyenne. Il s'appuie sur ce souci républicain de l'intérêt général, indépendamment des opinions spécifiques, des affinités partisanes ou des visées des uns et des autres.

A ce titre, la construction d’une démocratie et d’un Etat modernes nécessite la définition des causes réelles et profondes des problèmes de l’heure et la recherche concertée de solutions idoines. Pour leur part, les organisations de la Société civile identifient quatre (4) axes majeurs de réflexion :

1. la mise en place d’un cadre institutionnel consensuel à même de garantir l’impartialité des institutions;
2. la mise en place d’un système électoral crédible, susceptible d’organiser des élections libres, transparentes et dont les résultats seront acceptés par tous ;
3. les questions sécuritaires et les libertés publiques;
4. Le climat social.


II- LA MISE EN PLACE D’UN CADRE INSTITUTIONNEL CONSENSUEL A MEME DE GARANTIR L’IMPARTIALITE DES INSTITUTIONS.

Le régime établi par la Constitution du 11 octobre 2000 et réaffirmé par la récente révision constitutionnelle se veut républicain. L'ordre démocratique est assuré par des institutions supposées s’équilibrer et dont les missions respectives doivent prévenir les éventuels abus des détenteurs du pouvoir.

A l’épreuve des faits, les institutions constitutionnelles sont loin de s’équilibrer ou de s’arrêter les unes les autres. Une certaine connivence, régulièrement observée et dénoncée tant par les acteurs politiques que par les observateurs, freine le développement national et la conduite du pays selon les valeurs dans lesquelles le Peuple a foi.

• La souveraineté du peuple n’est pas toujours respectée ;
• La séparation des pouvoirs est fréquemment mise à mal ;
• L’Etat de droit n'est toujours pas affirmé ;
• Les fondements de la justice sociale ne sont toujours pas instaurés.

La dernière révision constitutionnelle est venue renforcer la position des sceptiques et apporter de l’eau au moulin de ceux qui estiment que l'ordre démocratique n'est pas équilibré.

Les dispositions permettant d’allonger l’ensemble des mandats électifs comme celles qui consacrent la possibilité pour le Président de la République de s’attribuer des pouvoirs exceptionnels sans en référer au Parlement sont venues en rajouter au déséquilibre institutionnel.

L’introduction de la notion de « bonnes mœurs » dans le fonctionnement régulier des associations, syndicats, partis politiques ou communautés religieuses n’incite guère à l’optimisme au sujet de la liberté d’association voire d’expression.

Il résulte de tout ceci que l'ordre institutionnel gabonais se présente aujourd’hui comme déséquilibré et que la dernière révision constitutionnelle n’a fait qu’accroître ce déséquilibre. Ce constat appelle de façon urgente à une remise à plat de tout le système et une redéfinition des fondamentaux qui doivent guider la mise en place d’institutions au service de tous.

I-1 LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

Selon l’article 8 de la Constitution, il est « le détenteur suprême du pouvoir exécutif qu'il partage avec le Premier Ministre ». Sa fonction principale consiste à veiller au respect de la Constitution et au fonctionnement régulier des institutions publiques.

Le seul fait qu’il soit également Président du Parti démocratique gabonais et que les présidents des deux chambres du Parlement soient membres d’instances censées le conseiller dans le cadre de ses attributions partisanes ne garantit nullement son impartialité.

Les conditions de la naissance du Parti démocratique gabonais et ses liens historiques avec l’appareil d’Etat ne permettent pas une application sereine et impartiale de l’article 20 de la Constitution.

Il s’ensuit des nominations aux hautes fonctions civiles et militaires fortement teintées de considérations partisanes et un mélange des genres qui, 21 ans après la restauration de la démocratie, est plus vivace que jamais.

En faisant de la défense et la sécurité une « exclusivité » du Président de la République selon la dernière révision constitutionnelle l’article 22 de la Constitution rompt non seulement l’équilibre des institutions en retirant au Premier ministre et donc au gouvernement ce maillon important des affaires publiques mais crée les conditions d’un climat sécuritaire ainsi que d’un pouvoir arbitraire et personnel.

L’article 24 de la Constitution consacre le principe de l’irresponsabilité du Président de la République devant le Parlement. En procédant, depuis plus d’une année maintenant, au rattachement d’établissements publics à la Présidence de la République, les autorités actuelles prennent sur eux le risque de rabaisser la fonction présidentielle en confiant au Président de la République des missions opérationnelles.

I-2 LE PARLEMENT

Emanation du peuple, le Parlement est aujourd’hui largement tributaire du découpage électoral. Or, il se trouve que ce découpage ne semble pas être par mu par des considérations idéologiques et ne tient nullement compte de la démographie et de la répartition des populations sur le territoire national.

Il s’ensuit un Parlement où les élus, notamment les députés, ont certes le même poids institutionnel mais représentent des portions du peuple très différentes du point de vue démographique.

Comment expliquer qu’une ville comme Oyem (70 000 d’habitants) ne dispose que d’un siège unique de député au même titre que la ville de NDINDI ( mois de 1000 habitants ) ? Bien que les données territoriales aient leur importance dans le découpage électoral, il convient de repenser la prise en compte des éléments démographiques pour un Parlement plus représentatif des populations.

L’article 43 donne aux chambres du Parlement la possibilité de fixer leur ordre du jour à la « majorité absolue de leurs membres ». Mais, dans la pratique cette disposition est difficile à mettre en œuvre. L’ordre du jour des chambres du parlement est, à ce jour, systématiquement dicté par le gouvernement. S’ensuit une confusion, un mélange des genres qui laissent croire que le Parlement à pour mission la mise en œuvre de la politique de l’Exécutif comme on l’a récemment lu et entendu de la part d’éminents parlementaires.

L’abandon, par le Parlement, de sa mission de contrôle et sa mise sous tutelle de l’Exécutif sont si manifestes qu’elles donnent lieu à une connivence telle que les présidents des deux chambres se retrouvent à faire office de représentants du Président de la République, comme on l’a récemment vu lors des cérémonies d’investiture de chefs d’Etat étrangers au Mexique, au Brésil ou au Burkina Faso.

I-3 LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Le contrôle de la constitutionnalité des lois et règlements s'exerce par le truchement d'une institution habilitée, en l'occurrence la Cour constitutionnelle. L'article 83 de la Constitution stipule : " La Cour constitutionnelle est juge de la constitutionnalité des lois et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques".

Le rôle de régulateur principal des pouvoirs publics relève également de la compétence de la Cour Constitutionnelle. L'article 83 de la Constitution dispose : " Elle est l'organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l'activité des pouvoirs publics ".

Le pouvoir de veiller sur la régularité des opérations électorales incombe aussi à la Cour Constitutionnelle. L’article 84 de la Constitution soulignent en substance qu'il veille à la régularité de l'élection du Président de la République, des élections législatives et locales, du référendum, en proclame les résultats et en examine le contentieux.

Les dispositions de l'article 84 liées aux compétences de la Cour constitutionnelle en matière électorale ne se justifient pas. Il est dangereux qu’une institution soit juge et partie. De par sa fonction de gardienne des libertés publiques, la Cour constitutionnelle a un rôle à jouer en amont des élections. Elle se saurait donc connaître du contentieux sans avoir la tentation naturelle de légitimer ce qu’elle a préalablement admis.

Le mode de désignation des membres de la Cour constitutionnelle laisse quelque peu perplexe. Une institution dont les décisions ne font l’objet d’aucun recours ne peut être composée uniquement de personnalités désignées par la même autorité.

La corporation des juristes et surtout le peuple souverain à travers ses élus devraient avoir sinon un droit de désignation, du moins un droit de regard ou de censure.

Le juge Constitutionnel doit bénéficier d’une forte légitimité et d’une grande liberté.

Sa légitimité dépendra fortement de son mode de désignation. Un juge, désigné par le parlement sur la base d’une majorité des 2/3 des membres , aura forcement plus de légitimité qu’un juge nommé par le seul Président de l’Assemblée Nationale, du SENAT ou de la République.

Sa Liberté, gage d’impartialité, dépendra de la nature de son mandat. Un mandat unique ou un mandat à vie procureront plus de Liberté et d’impartialité qu’un mandat renouvelable.

Ici il convient d’établir la différence entre les présidents d’institutions et les institutions elles-mêmes.

I-4 LES AUTRES ORGANES CONSTITUTIONNELS

Le Conseil National de la Communication a un rôle essentiel dans la démocratie gabonaise. Les dispositions de l’article 95 de la Constitution stipulent, entre autres, qu’il veille « au respect de l'expression de la démocratie et de la liberté de la presse sur toute l'étendue du territoire », à « l'accès des citoyens à une communication libre » et au «traitement équitable de tous les partis et associations politiques ».

Le même article de la Constitution ajoute qu’il veille au « au contrôle des programmes et de la réglementation en vigueur en matière de communication, ainsi que des règles d'exploitation », au « respect des statuts des professionnels de la communication » et à « l'harmonisation des programmes entre les chaînes publiques de radio et de télévision ».

Le Conseil National de la Communication a donc un mandat éthique, technique et politique. Sa composition ou du moins le mode de désignation de ses membres devrait lui permettre de répondre à cette triple exigence.

Outre les politiques, les professionnels et le peuple souverain à travers ses élus, devraient avoir sinon un droit de désignation, du moins un droit de regard ou de censure.

Comme les Juges Constitutionnels, les membres du Conseil National de la Communication doivent aussi jouir d’une forte légitimité et d’une grande liberté.

Ces deux (2) attributs, comme pour la Cour Constitutionnelle, dépendront aussi de leur mode de désignation et de la nature de leur mandat.

Ici également, il convient d’établir la différence entre les présidents d’institutions et les institutions elles-mêmes.

I.5. REVISIONS CONSTITUTIONNELLES

Les révisions constitutionnelles constituent l’origine de la plupart des crises politiques enregistrées ces derniers temps en Afrique.

Au Gabon , outre la Constitution Consensuelle de 1991, issue de la Conférence Nationale et la Constitution de 1994 , issue des accords de Paris ( Référendum ) , toutes les autres révisions se sont faites de façon parlementaire, le peuple ,l’opposition et toutes les autres forces vives de la nation y sont souvent exclus.

En général ces reformes constitutionnelles politiques se font toujours au détriment des libertés fondamentales des populations. L’élection à un tour, par exemple, prive souvent à la majorité la possibilité de désigner ou de sanctionner leurs élus : la plupart des élus n’obtenant pas plus de 50 % des suffrages.

Il est urgent de revoir les modalités concernant la révisions constitutionnelle pour permettre au peuple de s’exprimer de façon directe sur des sujets de haute importance comme : la durée des mandats électifs, la limitation ou non des mandats, les questions liées à l’équilibre institutionnelle, les questions liées à la sécurité et aux droits fondamentaux…

Par contre le parlement pourrait se saisir des reformes mécaniques de la constitution dans la cadre de l’adaptation de la constitution aux différentes traitées signées par le gouvernement au niveau international.

II.- LA MISE EN PLACE D’UN SYSTEME ELECTORAL CREDIBLE, SUSCEPTIBLE D’ORGANISER DES ELECTIONS LIBRES, TRANSPARENTES DONT LES RESULTATS SONT ACCEPTES PAR TOUS.


Depuis 1990, toutes les élections organisées au Gabon sont suivies de fortes contestations qui aboutissent le plus souvent à de scènes de violences occasionnant des lourdes pertes en matériel et en vies humaines :

1. Les législatives de 1990 ont été marquées par des violences sur une partie du territoire (Nyanga, Estuaire, Ngounié, Woleu-Ntem). Constatant l'insuffisance du matériel électoral (listes électorales, bulletins de vote, cartes multiples, urnes) et le manque de transparence dans l'organisation du scrutin, le Rassemblement National des Bûcherons (parti politique de l'opposition de l’époque) ordonne un boycott des élections au deuxième tour ;

2. Au cours de l'élection présidentielle de décembre 1993, malgré les recommandations des observateurs internationaux sur le bon déroulement du scrutin à l'intérieur du pays (sauf à Libreville), le Gabon frôle la guerre civile. Une forte vague de contestations (dégâts matériels et pertes de vies humaines) a suivi la déclaration des résultats annonçant la réélection du Président Omar Bongo. Cette contestation s'est traduite par un dédoublement institutionnel : l'auto-proclamation du Père Paul Mba Abessole, principal leader de l'opposition, comme Président élu, et la création d'un gouvernement parallèle chargé d'organiser de nouvelles élections. Cette situation s’est aussi traduite par la création d'un Haut Conseil de la République (HCR) regroupant les leaders de l'opposition, l'annonce d'une grève générale et le boycott de la cérémonie de clôture de la deuxième session du Parlement le 17 décembre 1993 par les députés de l'opposition ;

3. Malgré les instruments de transparence nés des Accords de Paris, les élections locales (1996) et législatives (1996) n'ont pas échappé au cycle de violences pré et postélectorales ;

4. Lors de la dernière élection présidentielle de 2005, une nouvelle crise éclate et le Président de l’UPG se refugie à l’Ambassade d’Afrique du Sud ;

5. La dernière élection présidentielle anticipée du 30 aout dernier n’a pas échappé à cette règle : l’annonce de la victoire du candidat du PDG est suivie par d’importantes scènes de violences à Port Gentil occasionnant d’importants dégâts matériels et corporels. On dénombre plusieurs morts et de nombreux cas de violations des droits de l’homme. La ville sera assiégée par l’armée pendant de longs mois. C’est toujours à la suite de cette élection que le Candidat MBA OBAME vient de s’auto-proclamer Président de la République ;

6. Les dernières élections législatives partielles ont aussi été entachées de grossières irrégularités ( manipulation de la liste électorale , fabrication de fausses pièces d’état civil , transfert des populations …).

Toutes ces réactions démontrent que la régularité procédurale et le degré de transparence des élections sont devenus un enjeu politique majeur (sinon le seul). Malgré plusieurs consultations de la classe politique sur ces questions, on est encore loin d’un cadre normal et régulier des élections au Gabon.

Au fil de ces élections, les Gabonais se sont détournés des urnes compte tenu de l’absence d’élections justes, régulières et transparentes : au cours des dernières élections législatives le taux d’abstention a atteint 85%.

La dernière élection présidentielle anticipée, au vue de la forte mobilisation des populations, aurait pu être un moment de réconciliation si elle n’avait pas été suivie d’une forte contestation et d’une crise politique.

Beaucoup d’observateurs s’accordent à le dire « les élections sont à la démocratie ce que les rayons solaires sont à la lumière : sans rayons solaires, point de lumière ! ».

La participation aux opérations électorales constitue un baromètre de la confiance que les citoyens portent à leurs dirigeants, aux élus et surtout aux institutions qui régissent la vie politique dans leur pays.

La Charte Universelle des Droits de l’Homme est clair là dessus : « c’est la volonté du peuple, exprimée par le biais des élections libres, crédibles et transparentes qui constitue la base de l’autorité gouvernementale ».

La Constitution Gabonaise le confirme dans son Principe fondateur en son article 2 « Gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple » et en son article 3
« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce directement ou

indirectement par le referendum ou par élection, selon le principe de la démocratie pluraliste… ».

La nécessité de remettre l’électeur au centre de la vie politique nationale s’impose : l’adoption de la biométrie dans l’élaboration du fichier électoral et la réforme de la Cénap constituent des préalables primordiaux à l’atteinte de cet objectif.

III- LES QUESTIONS SECURITAIRES ET LES LIBERTES PUBLIQUES

Le problème de sécurité que posent le rapport de la population aux forces de défense et de sécurité et les libertés publiques découle de la rupture de confiance entre le peuple et les institutions aggravée par le sentiment que les forces de défense et de sécurité n’ont qu’une vocation répressive au service du pouvoir exécutif.

Il faut en effet affirmer que depuis 1990, les forces de défense et de sécurité ne sont perçues que comme un « outils de domination et de terreur » au service du pouvoir exécutif. Cette impression s'est davantage renforcée depuis le décès du Président Omar Bongo Ondimba.

Plusieurs mesures prises par le nouveau pouvoir accentuent le clivage entre le peuple et ses forces de défenses et de sécurité :

• augmentation des salaires des agents de sécurité et de défense ;
• instauration d’une retraite complémentaire aux agents de sécurité et de défense ;
• recrutements massifs dans l’armée et la police au détriment des secteurs sensibles comme l’éducation et la santé ;
• création d’une trésorerie spéciale des armées.

Par ailleurs la prise en compte, par les analystes politiques y compris étrangers et singulièrement Français, de l’armée dans le processus d’accession au pouvoir a fini par accréditer l’idée que les forces de défense et de sécurité ne sont pas au service du peuple mais du pouvoir en place et qu’elles sont instrumentalisées à des fins politiciennes.

Compte tenu de ce que l’armée est désormais intégrée dans les analyses politiques et identifiées comme un atout en vue de la conquête ou la conservation du pouvoir politique, le problème de sécurité et du respect des libertés publiques est vécu sous les formes suivantes :

1. Résurgence de dispositions réglementaires datant du monopartisme ;
2. Inadaptation de nombreuses dispositions légales et réglementaires au contexte ;
3. Non respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur concernant le rôle et les missions des différentes forces ;
4. Recrutement des personnes étrangères au sein de la Garde Républicaine ;
5. Usage à des fins partisanes de troupes légalement constituées;
6. Recrutement à base ethnique et tribale ;
7. Commandement ethnocentrique de la force publique;
8. Reconstitution de la Garde présidentielle sous le nom Garde républicaine, contrairement à l'un des actes des Accords de Paris ayant recommandé l’évolution de ce corps ;
9. Politisation de la force publique.

Tous ces faits, qui engagent la responsabilité collective dans une société en proie à une fracture sociale évidente, exposent la Nation et le pays à de réels risques de rupture instantanée de la fragile situation actuelle.

En effet, tout porte à reconnaître que la situation actuelle couve en elle les germes d'une explosion latente. Il faut cependant relever que ce constat terrifiant n'est plus nouveau puisqu’il date de l’élection anticipée du 30 août 2009.

Ce constat sans cesse renouvelé témoigne de la persistance de la menace réelle d'une crise majeure d'autant plus redoutable que le Gabon fait partie d'une sous-région profondément embrasée et d'autant plus préoccupante que le Gabon n’a pas de culture guerrière et n’a jamais connu d’affrontements interethniques. Cette menace collective pose la nécessité et l'urgence d'un sursaut républicain qui transcende les ambitions et les positions partisanes, afin d'ouvrir le pays à l'espoir d'une démocratie réelle et porteuse de mieux-être.

En conséquence, toutes les composantes crédibles et influentes de toutes les obédiences de la communauté nationale doivent pratiquement prendre la mesure de ce risque collectif grave et s'engager avec responsabilité dans la voie salutaire de la reconquête de la cohésion nationale et sociale. Les derniers développements de l’actualité nationale doivent inciter à la réflexion. Ils doivent être perçus comme des symptômes d’un mal encore plus profond et qu’il convient de combattre à la racine.

La question des libertés publiques se révèle encore plus préoccupante au regard du flou législatif et réglementaire au sujet des acteurs non étatiques. Le Gabon ne dispose pas de loi spécifique aux ONG. Les ONG se créent, s’organisent et fonctionnent selon la loi 35/62 du 10 décembre 1962 relative aux associations. Cette loi pose les principes généraux censées guider le milieu associatif mais ne prend nullement en compte les spécifiés liées aux différents types d’associations.

En outre, la laïcité de l’Etat se trouve écornée par la trop forte promiscuité entre les plus hautes autorités de l’Etat et certaines religions ou officines initiatiques. Dès lors, l’émulation sociale et le respect des libertés publiques se trouvent donc mis à mal.

A ce sujet, l’introduction, à la faveur de la dernière révision constitutionnelle, de la notion de « bonnes mœurs » dans l’appréciation des organisations politiques et associatives nationales n’est pas de bon augure.

IV- DESCRIPTATION DU CLIMAT SOCIAL

Le protocole d’accord signé entre le gouvernement et les partenaires sociaux à la veille du décès du Président BONGO parties n’est pas toujours mis en application.

Au contraire les rapports entre les partenaires sociaux et l’exécutif se sont considérablement dégradés à en juger par la multitude de conseils de discipline à l’encontre des responsables syndicaux et par la tentative du gouvernement à rendre effective les articles 64 et 65 de la Loi N°1 /2005 du 04 Février 2005 portant statut général de la Fonction Publique. En effet, dans cette Loi, il est stipulé que « l’exercice d’un emploi de Fonction Publique est incompatible avec les fonctions de membres de cabinet politique ou particulier, membre permanent du bureau directeur ou exécutif d’un parti politique, d’un syndicat, d’une association sportive … ».

D’autre part malgré la volonté du Président de la République à reformer l’Etat, le gouvernement peine à mettre en musique sa politique d’émergence tant certaines grandes décisions prises sont confronté soit à des pesanteurs externes soit à des pesanteurs internes quand elles ne portent pas en elles les germes de la destruction de notre tissu économique avec des conséquences sociales imprévisibles (Interdiction des exportations des grumes, instauration de la journée continue, fermeture des débits de boisson à 22 heures …).

Enfin des mesures disciplinaires prises à l’encontre de certains faussaires démasqués au cours du recensement des agents de la fonction publique sont jugés discriminatoires par plusieurs observateurs qui souhaiteraient qu’une décision globale soit prise en ce qui concerne toutes les dérives et crimes économiques commises tout du long du règne du Président OMAR BONGO ONDIMBA.


IV- RECOMMANDATIONS POUR UNE SORTIE DE CRISE

L'installation définitive d'un nouvel ordre démocratique requiert un certain nombre d'exigences parmi lesquelles la capacité d'organiser des élections libres et transparentes tout comme celle des dirigeants de se conformer au régime de la loi (Constitution, lois et règlements de la République).

La légalité procède de la légitimité et la légitimité n’a de sens que si elle repose sur des fondamentaux claires et correspondant à la réalité politique, économique, sociale et culturelle d’un peuple.


IV-1. Recommandations à la majorité

Prenant acte de la désignation du Président Ali Bongo Ondimba comme vainqueur de l’élection anticipée du 30 août 2009 pour un mandat de sept ans et de la volonté de repenser les bases de notre vivre ensemble ainsi que les fondements de notre démocratie et de notre Etat, les Organisations de la Société civile recommandent :

- de décrisper la situation politique afin de créer les conditions d’un dialogue fécond et serein ;

- de s’astreindre au respect strict et scrupuleux de l’esprit et la lettre de nos lois et règlements ;

- établir un cloisonnement définitif entre le Parti démocratique gabonais et les instances étatiques.


IV-2. Recommandations à l’opposition

Afin de créer les conditions d’un sursaut citoyen et républicain à même se jeter les bases d’une concertation nationale franche et sincère, les Organisations de la Société civile recommandent :

• de prendre acte de l’élection du président Ali Bongo Ondimba pour un mandat de sept ans ;
• d’admettre que les problèmes du Gabon se règlent entre Gabonais avec les lois et institutions gabonaises ;
• d’admettre que les urnes sont la seule et unique voie d’accession au pouvoir, en dépit du contexte international qui peut donner des idées.

IV-3. Recommandations à la Communauté Internationale

Dans le souci d’aider le peuple gabonais à continuer à vivre dans un environnement de paix et de stabilité, les organisations de la société civile recommande :

• d’user de toute son influence pour amener toutes les parties prenantes à la table de négociation,
• d’accompagner les parties prenantes dans l’organisation du dialogue nationale ;
• d’appuyer le Gabon dans la mise en œuvre des reformes issues de ce dialogue.

V- PROPOSITIONS DE LA SOCIETE CIVILE

Tout en renouvelant ses positions à savoir :

- La reconnaissance du Président Ali Bongo Ondimba comme Président de la République et acteur principal dans la redéfinition de notre vivre ensemble ;

- Le rejet de tout autre mode de prise du pouvoir qui ne soit ;
- Le rejet de la confiscation du pouvoir par la force ;
- Le rejet de la répression comme mode de règlement des conflits et des contradictions ;
- La prise en compte de tous les acteurs dans un processus de concertation nationale globale et inclusive comme moyen d’arriver à une stabilité véritable.

Les organisations de la société civile estiment que la réflexion devra porter sur :


V.1. La Constitution

- Les modes et les Conditions de révision de la Constitution,

- L’équilibre institutionnel ;

- le recentrage des compétences de la Cour constitutionnelle, la réforme du mode de désignation de ses membres et la nature du mandat des Juges ;

- la réforme du Conseil national de la Communication, du mode de désignation de ses membres et la nature du mandat des Conseillers ;

- la clarification des pouvoirs du président de la République en période

normale comme durant un éventuel intérim ;

- le rôle et statut du gouvernement en place au moment de la transition ;
- l’éligibilité des ministres en fonction durant la transition ;
- l’allongement de la durée de la transition ;
- le retour au scrutin à deux tours ;
- la limitation du nombre de mandat ;


V.2. Les élections

- La biométrie et la transparence électorale ;
- La refonte de la Cénap ;
- Le découpage électoral et le poids démographique.

V.3. Sécurité et Libertés publiques

- la réforme des textes régissant les Acteurs non étatiques ;
- la dépolitisation de l’administration ;
- la réforme de la Garde républicaine pour en faire une force de protection des hautes personnalités et institutions de la République ;
- Recrutement des personnes d’origines étrangères au sein de la Garde républicaine ;
- La redéfinition du rapport entre l’armée et le peuple en période de crise ;
- la codification de la pratique religieuse afin de soustraire les religions de l’influence du politique ;
- la traduction en textes des principes consignés dans la Charte nationale des libertés adoptée en 1990.


V.4. Du climat social

• Suite à donner aux négociations entre le gouvernement et les partenaires sociaux sur la base du protocole d’accord signé le …… ;
• Suite globale à donner aux dérives et autres crimes économiques commises tout au long du règne du Feu Président BONGO ONDIMBA.


Fait à Libreville le 17 Février 2011

Contacts presse :
gmpaga@yahoo.fr :0024107519932
ona_essangui@yahoo.fr: 0024107294140

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